mercredi 22 février 2017

Prononcez "Skandria"



Inutile de verser quelques larmes tardives, Alexandrie n’est plus. Le Quatuor s’est depuis longtemps dissipé dans le vent frais de la Méditerranée et l’on doit se contenter de promenades, toujours têtes en l’air, pour y dénicher encore, çà et là, ces petits signes du passé qui excitent tant notre imagination.




Fort heureusement, il reste le poisson ! Nous entrons dans un restaurant très réputé pour son point de vue et sa cuisine raffinée. Nous nous apercevrons plus tard que le cuisinier ne sait pas cuire la seiche ( ce qui n'arrive jamais dans un restaurant plus populaire). Mais, ce qui nous gêne vraiment, ce midi-là, c’est encore cette fameuse coutume égyptienne de toujours vouloir laisser la fenêtre ouverte ! Aucun tsunami ne pourra jamais bouleverser cette fâcheuse habitude. Nous mangeons sans enlever notre manteau, comme la plupart des clients. Plus tard, alors que nous profitons du soleil sur la jetée, je m’amuse de la forme des ballons vendus par ce marchand ; impossible de ne pas faire le rapprochement avec un gros sexe et ses deux petites boules…Curieux.



Jusqu’ici plongée dans la somnolence, la citée des chats se réveille au crépuscule avec les chants des Imans, les bataillons d’oiseaux joueurs, les cris aigus des enfants. Même le ciel s’y met, réveillant toutes ses couleurs endormies dans les nuages. 





Julius Marx
Photo 1 : Fragment de tête d’une des deux statues plantée jadis devant le phare, sur l’île de Pharos.



jeudi 16 février 2017

Pour Laura







Te souviens-tu de Lucca ?

Tu as saigné du nez
et tu es restée digne,

la tête haute

tranquillement assise

au centre de la toile parfaite,
sur le dos même de la gigantesque araignée.

Quel âge avais-tu…
Huit, neuf, dix ans ?

Je n’ai pas la mémoire des chiffres
mais il me reste celle des émotions.

Te souviens-tu de Lucca

du sang, du nez, de l’araignée ?


Julius Marx

mercredi 15 février 2017

Mode d'emploi






Les livres ne se font pas comme les enfants, mais comme les pyramides, avec un dessin prémédité, et en apportant des grands blocs l’un par-dessus l’autre, à force de reins, de temps et de sueur, et ça ne sert à rien ! et ça reste dans le désert ! mais en le dominant prodigieusement. Les chacals pissent au bas et les bourgeois montent dessus, etc.

 Gustave Flaubert


(Correspondance)

mardi 14 février 2017

Au regretté Loulou






Je commence avec la statue, parce que c’est là que j’ai entamé le projet. Pourquoi l’écriture nous fait-elle poursuivre l’écrivain ? Pourquoi ne pouvons-nous le laisser en paix ? Pourquoi les livres ne sont-ils pas suffisants ? C’est ce que voulait Flaubert-peu d’écrivains ont cru plus que lui en l’objectivité du texte écrit et en l’insignifiance de la personnalité de l’écrivain ; et cependant nous continuons à désobéir. L’image, le visage, la signature ; la statue à 93 pour 100 de cuivre et la photographie de Nadar ; le petit morceau de vêtement et la boucle de ses cheveux. Qu’est-ce qui nous excite dans les reliques ? Ne pensons-nous pas que les mots suffisent ? pensons-nous que les vestiges contiennent quelque vérité ancillaire ? Quand Robert Louis Stevenson est mort, sa nounou écossaise qui avait le sens des affaires, se mit à vendre calmement des cheveux qu’elle prétendait avoir coupés sur la tête de l’écrivain quarante ans plus tôt. Ceux qui y crurent, qui en recherchèrent, qui en demandèrent, en achetèrent assez pour rembourrer un canapé.
Julian Barnes

Le perroquet de Flaubert

vendredi 10 février 2017

Encore !







Un nouveau blog à consulter. 
Il vous suffit de cliquer sur mon profil et de sélectionner
"La vie anecdotique."
Julius.

jeudi 9 février 2017

Actualités (2)



Les hommes politiques poussent sur le fumier humain.
Francis Picabia

mercredi 8 février 2017

Pour les cireurs d'étoiles




Ne feront partie de cette académie que ceux qui auront œuvré, avec modération ou éclat dans ces domaines : voleurs de carbure et voleurs de feu, ivrognes, insulteurs des pouvoirs publics, rêveurs debout, noctambules, trousseurs de lycéennes, chatouilleurs de sonnets, abrutis par le vice, prophètes, escrocs, amateurs du petit cinoche clandé, fervents de la douce, obsédés, chasseurs de fraises sauvages, harangueurs de nuées, canaques, voyou danois, cireurs d’étoiles, Ulysse de banlieue, brouteur de toisons d’or, satyres en activité ou honoraires-et nous en passons.


André Hardellet (Revue Jungle)
Photo (André Hardellet par Doisneau)

vendredi 3 février 2017

Actualité





Je suis morte pour la beauté, mais à peine étais-je installée dans tombe, qu'un qui était mort pour la vérité fut couché dans une niche adjacente.
Il demanda doucement pourquoi j'avais péri ?
-Pour la beauté, répondis-je.
-Et moi pour la vérité, les deux ne font qu'un ; nous sommes frères, dit-il.
Et de la sorte, tels des parents se rencontrant la nuit, nous parlâmes d'une niche à l'autre, jusqu'à ce que la mousse ait atteint nos lèvres et recouvert nos noms.


Emily Dickinson