-Bêê-naaard ?
reprit-elle. Parfois, je fume après l’amour.
-Ca ne
m’étonne pas, lui répondis-je. Oh, tu voulais dire…une cigarette ?
-Oui.Ca te
gêne ?
-Non, bien
sûr que non.
-Elles sont
dans le tiroir de la table de nuit. Ca ne t’ennuierait pas de me les
passer ?
Je lui
tendis un paquet de Camel sans filtre à moitié plein. Elle en mit une entre ses
lèvres et me laissa craquer une allumette pour la lui allumer. Elle tira dessus
comme si sa vie en dépendait, puis ourla les lèvres et rejeta la fumée telle
Bacall montrant à Bogart comment siffler.
-Bien sûr
une cigarette ! me lança-t-elle soudain. Qu’est-ce que je pourrais fumer
d’autre, Un hareng ?
-Non, sans
doute pas, acquiesçai-je.
-C’est pour
adoucir la tristesse, précisa-t-elle. Te dirai-je quelque chose ? Je
voulais faire l’amour avec toi le premier soir, Bêêr-naaard. Mais je savais que
ça me rendrait triste.
-Je ne suis
donc pas si bon que ça ?
-Comment
peux-tu dire une chose pareille ? Tu es un amant merveilleux. C’est pour
ça que tu me brises le cœur.
-Je ne
comprends pas.
-Regarde-moi
Bêêr-naaard.
-Tu pleures.
Je tendis la
main pour essuyer une larme au coin de son œil. Une nouvelle l’y remplaça
promptement.
-Il est
inutile de les essuyer, me dit-elle. Il en vient toujours d’autres.
Lawrence Block
The burglar who Thought
he was Bogart
(Le Bogart de la cambriole)
Photo : Bogart/ Bacall (to have and to have not)