samedi 19 décembre 2020

Clap de fin




Il contemple la frontière et se demande ce qui se passe au Mexique. le chaos et la violence se poursuivent. Rafael Caro est mort et Tito Ascension est le nouveau "parrain".  Des hommes brutaux et stupides sont au pouvoir des deux côtés de la ligne de séparation.
Mais il n'y a pas de mur, se dit Keller en souriant.
Et il n'y en aura jamais. Une frontière est une chose qui nous sépare, mais qui nous init également; il ne peut pas y avoir de véritable mur, de même qu'à l'intérieur de l'âme humaine aucun mur ne sépare les meilleurs penchants des pires.
Keller le sait bien. Il a vécu des deux côtés de la frontière.
Il prend la main de Marisol et ensemble ils redescendent la colline en boîtant.

Don Winslow 
La Frontière

Dernières lignes de la trilogie de Don Winslow consacrée au monde de la drogue après La Griffe du Chien et Cartel.

Eblouissant !

samedi 12 décembre 2020

De l'amour





Quand nous passions ensemble à travers les rues fréquentées, les gens se retournaient pour le plaindre l'aveugle. Ils en ont des pitiés les gens, pour les invalides et les aveugles et on peut dire qu'ils en ont de l'amour en réserve. je l'avais bien senti, bien des fois, l'amour en réserve. Y en a énormément. On peut pas dire le contraire. Seulement c'est malheureux qu'ils demeurent si vaches avec tant d'amour en réserve, les gens. Ca ne sort pas, voilà tout. C'est pris en dedans, ça reste en dedans, ça leur sert à rien. Ils en crèvent en dedans, d'amour.
Louis Ferdinand Céline
Voyage au bout de la Nuit

dimanche 6 décembre 2020

L'âge du doute





 Un nouveau Montalbano c’est toujours une bonne nouvelle. D’autant plus que d’après l’ami

 Quadruppani cet opus là serait l’avant dernier. Puis, une fois l’euphorie passée, vient le 

moment tant attendu où le lecteur se couche, en prenant bien soin de remonter la couette 

sous son menton, pour un beau voyage sicilien.

Bon, le premier problème d’un Montalbano c’est qu’il se lit trop vite, beaucoup trop vite 

même. Voilà une chose qui n’a pas changée. Ce qui change c’est ce malaise persistant qui 

s’installe chez le lecteur. Un trouble évident que l’amateur cherche à cacher mais qui 

revient sans cesse, l’empêchant d’éteindre la lumière, de redescendre les escaliers quatre à 

quatre pour aller lire à sa douce moitié un de ces passages si croustillants qui fleurissaient 

autrefois dans les aventures de notre bien-aimé commissaire. Ce trouble venant du fait que 

le thème principal du roman (me semble-t-il) est la vieillesse. Oui, les inconditionnels de sa 

Seigneurie devront bien en prendre leur parti, le cerveau de Montalbano, de notre 

Montalbano, commence bel et bien à se ratatiner ! Notre héros commet des erreurs et, c’est 

bien plus grave encore, semble être sur le point d’abdiquer.

Même si la résolution de l’intrigue (en fait deux intrigues étroitement liées) lui appartient 

encore, on devine que le coeur n’y est plus du tout. Rassurez-vous, il y a toujours

quelques petites attaques contre les puissants et d’habiles stratagèmes montalbaniens mais 

ils sont hélas noyés dans de gros nuages de mélancolie. Ce ciel de Sicile, amis lecteurs, 

devient gris !

Gris, il l’est aussi chez moi, ce fichu ciel. Hier, en courant acheter le bouquin dans une 

grande surface (c’est juste de la provoc) je cherchais dans les rayons à la lettre M , comme 

Montalbano avant qu’une employée désabusée me recommande de visiter le casier de la lettre C, 

comme Camilleri. Bon sang ! Moi aussi, il semble bien que mon cerveau commence à se ratatiner.

Julius Marx