Je me
souviens de Robert Hirsch dans le rôle
de Bousin du Fil à la patte de Feydeau, dans l’émission Au
Théâtre ce soir, à la télévision. J’ai demandé pourquoi les acteurs, à la
fin de la représentation, avaient tous l’air si triste et réservés, alors qu’ils
venaient de crier et de gambader dans tous les sens pendant deux heures. Quelqu'un
m’a répondu que le théâtre était une chose sérieuse.
Je me
souviens des petites motos Malaguti, avec ce bruit strident qui sortait des
pots d’échappement et qui énervait beaucoup les adultes.
Je me
souviens de Guignol’s Band, le premier livre que j’ai vraiment lu
et de ces cinquante premières pages hallucinantes.
Je me
souviens que mon oncle ressemblait à Frank Sinatra et qu’il avait voyagé jusque en
Amérique sur un porte-avion.
Je me
souviens de la publicité « on a toujours besoin de petit-pois chez soi. »
Je me souviens
de la première fois où j’ai vu Une Nuit à l’Opéra avec les Marx
Brothers. Depuis, je l’ai vu plus de cinquante fois.
Je me
souviens d’avoir découpé et collé sur des feuilles dans un classeur tous les
articles de Jean-Patrick Manchette sur le cinéma dans Charlie-Hebdo.
Julius Marx
Pour les petits nouveaux de ce blog, les deux premiers " je me souviens" déjà publiés sont à la suite.
Je me
souviens des coups de règle en fer sur les doigts.
(et d'un
jour où le professeur a demandé à un nouveau "quel est le nom de cet
imbécile au bout de la règle?" et que le nouveau a répondu " de quel
côté, monsieur?")
Je me
souviens des Malabars achetés chez le confiseur au coin de la rue.
(Et aussi
que je ramassai les emballages vides dans la cour pour faire croire que j'en
avais acheté plus que les autres)
Je me
souviens de l'odeur enivrante des livres, à la rentrée scolaire.
(Et de
mon voisin qui se moquait de moi parce que je suçais le petit bâton de colle)
Je me
souviens des oignons et de la petite fleur de Sydney Bechet, des disques 45t
gagnés chez Antar avec les pleins de Mobylette.
(Et du
disque de Trini Lopez acheté avec l'argent donné par ma tante pour le cadeau de
la fête des mères)
Je me
souviens du petit carnet où j'écrivais les mots des grands que je ne comprenais
pas.
(Et des
signatures imitées et griffonnées sur les 45 tours, des copains que je n'avais pas)
Je me
souviens des vaccinations collectives.
(Et de
l'infirmerie militaire avant le départ en Afrique où nous sommes restés plus
d'une demi-heure avec la même aiguille dans le dos)
Je me
souviens d'un film d'animation avec un ours, une petite fille et un marchand de
sable, mais pas du titre du film.
(Et de
Fernandel avec sa vache Marguerite, au Gaumont Palace, place Clichy.)
Je me
souviens de la soupe au tapioca.
(Et de
l'odeur insupportable des poireaux dans la cuisine de la pension)
Je me
souviens de la télé en noir et blanc.
(Et du
carré blanc)
Je me
souviens de mon premier vélo de course de marque Gitane, offert par mon
grand-père.
(Et du petit
morceau de carton que l'on glissait dans les rayons pour imiter le bruit d'un
moteur)
Je me
souviens des flacons plats de pastis volés à TVS. Sale goût, pur.
(Et des
paquets de P4, achetés à plusieurs et fumés en vitesse)
Je me
souviens des scoubidous.
(Et de
l'agate que je glissais au milieu. Et puis de la pièce de 5 francs que l'on
perçait pour avoir le même collier que Vince Taylor)
Je me souviens
d'avoir croisé Maurice Genevoix montant dans sa belle bagnole dans la grand'
rue.
(Et
Michel Simon, avec un chapeau et une grande cape noire, sur le trottoir de la
rue St Denis.)
Je me
souviens de son prénom : Isabelle.
(Marie-France)
Je me souviens
de la baguette à 1 franc.
(Et du
signe de la croix, tracé avec son Opinel par le directeur de la pension, sur la
miche de pain.)
Je me
souviens de séances de catéchisme chez une vieille dame, ponctuées par un
chocolat chaud et qu'elle récompensait par un film à la télé comme Poly ou
l'Homme du Picardie.
(Et puis
aussi que tout le monde s'était moqué de moi lorsque j'avais
prononcé le H de eucharistie)
Je me
souviens de mon premier voyage en train ; j'avais deux ans.
(Et de
mon grand-père qui m'accompagnait à la pension par le train. Il pouvait
calculer la vitesse du train avec sa montre. Je ne me rappelle plus comment.)
Je me
souviens de l'arrivé de la télé.
(Et de la
première publicité. C'était pour la marque Schneider , je crois.)
Je me
souviens du cours d'histoire en CE2 qui commençait par : nos ancêtres les
Gaulois.
(Et du
cours de Français où j'avais prononcé excréments au lieu d'ingrédients.)
Les textes
sans italiques sont de Georges Pérec,
bien évidemment.
Je me
souviens enfin d'avoir trouvé un très gros volume de correspondance de Georges
Pérec sur le stand d'une braderie et puis, d'avoir noté cette phrase :
"Aussi
mauvais qu'il soit, un texte élargit l'horizon borné de l'opinion que l'on peut
avoir de soi."
Je me souviens (2)
Je me
souviens des Chamonix orange et d’avoir été très étonné de ne pas en trouver en
colonie de vacances en Haute-Savoie.
Je me
souviens du docteur Richard Kimble à la recherche du manchot meurtrier de sa
femme et du dernier épisode de la série diffusé le soir du 31 décembre avant
minuit.
Je me
souviens de la Caravelle. On disait qu'elle était capable de planer de Paris à
Marseille.
Je me
souviens de l'émission La séquence du spectateur avec la voix
de Catherine Langeais. Longtemps, je me suis demandé comment un spectateur sain
de corps et d’esprit pouvait sortir son papier à lettres et écrire à la télévision
pour demander à voir l’extrait d’un film
avec Josélito, l'enfant à la voix d'or.
Je me
souviens des chemisettes en Tergal à manches courtes. Et des cravates qui tenaient grâce à un élastique.
Je me
souviens d'une bagarre en forêt à propos d'une cabane que l'on voulait baptiser
"notre repère". Nous n'étions que deux à exiger que l'on change
l'orthographe.
Je me
souviens d'avoir fumé des lianes et des peaux de bananes séchées.
Je me
souviens de la marque Griffon de la chasse d'eau des toilettes
de notre maison et surtout du merveilleux dessin de l'animal
mythique.
Je me
souviens des paquets de cigarettes Smart et d’autres, ramenées d’Espagne
par mes parents, de toutes les couleurs.
Je me
souviens du Benfica de Lisbonne et de son gardien de but Costa Fereira et de
mon père qui a cassé un fauteuil en sautant de joie le soir d’une finale.
Je me
souviens des "compositions" de fin de trimestre et d’une composition
de « pâte à modeler ».
Je me
souviens d'avoir appuyé sur le ventre des truites pour qu'elles atteignent la
mesure de 20 cms. Puis, du feu de bois que l’on faisait sur la rive pour les
manger illico.
Je me
souviens d'avoir embarqué dans un DC6, de la fumée noire qui sortait des
moteurs et de tous les sièges qui tremblaient au moment du
décollage.
Je me
souviens des hôtesses qui distribuaient des bonbons avant le décollage de
l'avion.
Je me souviens
d'avoir failli tomber de voiture sur le circuit des 24 heures du Mans,
miraculeusement rattrapé par ma mère.