20 XI 1947.-
Jadis, quand nous étions cinq ou six à table, et que Nina faisait la soupe du
déjeuner (le plat du dîner, c’était la grand-mère qui le faisait), de temps en
temps, il arrivait que, d’une assiette creuse, on retire lentement, à deux
doigts, un cheveu, un cheveu châtain, fin, long, long. Celui qui l’avait touché
protestait, contrarié ; et Nina, mortifiée, se confondait en excuses. A
présent, nous ne sommes que deux à table, et elle ne cuisine plus, et il n’y a
plus de cheveu dans la soupe. Mais l’après-midi d’avant-hier, comme je
découvrais le lit pour m’y reposer, le lit qu’elle fait tous les matins, je
trouvai un cheveu, l’un de ses cheveux, fin, propre, assez long, gris.
Virgilio
Giotti
Notes inutiles
L’écriture
de Giotti est une musique, une musique douce, apaisante, parfaite, et l'on frissonne en entrant dans cette banalité enchantée de détails scintillants où le quotidien devient couleurs. Une fois encore, le dernier mot au poète, celui de Pasolini qui écrivait :" Giotti, un désespoir sénile dans un coeur d'enfant."
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