samedi 12 novembre 2016

Le Polar Est kafkaïen



Pendant mes jours de liberté je reste allongé sur mon lit, plein de chagrin à cause de ma maîtresse, et j’examine mes quatre petits murs, couverts par mon œil trop vif des visages de mes ancêtres, dans la peinture, le plâtre et la maçonnerie. Je vois la monotonie du sang et des cauchemars, et j’écoute la pluie crépiter, sinistre, par la gouttière.
Notre église, le lieu de sépulture de mes parents, est à vendre et elle est étayée par des poutres. Lors de mes visites je sens les morts qui attendent dans les hautes roncières derrière les tombes. Par la suite je rêve d’eux : ils sont gris et me désignent du doigt sous la pluie implacable et me supplient d’agir pour eux. Comme j’en suis incapable, ils se détournent sans espoir et disparaissent de nouveau dans la haie, ratatinés dans des imperméables militaires pourris.
Et comment rendrons-nous compte aux autres de notre propre perte, de notre propre peine, une fois que nous aurons quitté la vie pour rejoindre un père mort auprès d’un feu mort dans l’obscurité d’un pays qui s’en est allé ?
Robin Cook
How the dead live
(Comment vivent les morts)
Photo: Tim Page (Universal Soldier)

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