Il faut
imaginer la jeune fille légèrement éblouie.
Il faut
toujours imaginer la jeune fille légèrement éblouie et c’est ainsi qu’Assia
Rafa fait son entrée dans chacun de mes rêves de Noirbourg.
Parfois, je
la vois qui relève les yeux alors qu’elle est penchée sur le travail d’un des
nombreux mômes venus faire leurs devoirs au centre social de la Zone : un
rayon de soleil a traversé une vitre douteuse pour se poser sur une carte de
géographie représentant l’empire colonial français. Assia change légèrement de
position et reprend à voix basse ses explications pour le gamin Gitan aux yeux
trop grands, au regard trop clair.
Jérôme Leroy
Jugan
A Noirbourg,
la Poisonville de la Manche, l’heure
des règlements de compte est venue. C’est le moment de compléter les cases
débit et crédit. Avant le grand saut, il est important que personne n’échappe à
cette dernière vérification, cet
ultime combat.
Autant le
dire tout de suite, ce roman de Jérôme Leroy fait partie des bouquins que l’on
savoure et, il faut au lecteur attentif qui veut à tout prix prolonger la
lecture, une autodiscipline draconienne pour ne pas s’envoyer un à un la
totalité des chapitres à toute vitesse.
Si les
personnages sont tous attachants, c’est aussi du côté de la
« méthode » qu’il faut chercher les raisons de cette réussite.
L’intrigue nous est racontée par un narrateur omniscient, dont on ne sait pas
toujours s’il rêve ou s’il est éveillé, qui se permet un incessant voyage dans
le temps, volant çà et là entre les époques et les lieux. Le temps elliptique
est ici aussi volontairement malmené que dans un récit cinématographique.
L’intemporalité
de ce récit veut elle signifier par la même occasion l’intemporalité de la
lutte ? Rodain, le vieux
syndicaliste vaincu, cite Marx, qui lui-même citait Hegel à propos de l’histoire
qui se répète « une première
fois sous la forme de tragédie, la deuxième sous forme de farce. »
Finissons
avec une simple petite remarque à propos des « épiciers arabes ».
Dans l’instructif spectacle de Fellag sur la préparation du couscous, l’auteur
nous raconte l’histoire de cet épicier qui en a assez qu’on le traite d’arabe. « Il n’a rien contre les arabes, bien au
contraire, mais lui est Berbère marocain (ou autre) et il en a plus assez qu’on
le prenne pour ce qu’il n’est pas. Mais,
il ne dit rien. Il respecte la France, la légèreté et l’ignorance de ses
habitants. »
Julius Marx
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire