mercredi 18 mars 2020

Confinement (2)



La lune paraît. Comme une orange trop mûre, elle flotte à la crête des monts, jaune, chaude, pleine à craquer, anxieuse comme une femme enceinte. Vous n’avez pas pu nous prendre ce corps céleste, ce coup d’oeil sur l’éternité, cette colossale projection de notre âme. Je retrouve soudain le monde et sa cohérence, et je comprends que tout le chagrin que l’on éprouve ici n’est que l’expression d’un point de vue carcéral fait de bassesse, d’accablement et d’enfermement derrière des murs. Mais alors, sacrebleu, pourquoi ne pas l’avoir caché derrière des rideaux ? Sont-ils mauvais psychologues ! Le regard, en effet, suffit à rendre le prisonnier libre comme l’air.

Oskar Panizza

Ecrits de prison

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire