vendredi 13 juillet 2012

Voyage


A la différence du paysage européen, étroit et clos comme son ciel, le paysage américain semble engloutir toutes frontières : il irradie de partout le sens de l'infini.
Une pareille immensité, qui se reflète dans la forme ouverte, dispersée, et même désolée, de la structure urbaine, représente pour l'individu un élément d'excitation et de défi que quiconque peut saisir. A peine met-on le pied sur ce continent qu'on comprend qu'il est le règne du vide, du possible et de l'indéterminé, où s'inventer une nouvelle vie, se forger un nouveau style, est la chose la plus immédiate et la plus naturelle qui puisse venir à l'esprit.

La poésie des maisons américaines tient à leur air provisoire, qui vient directement de l'esprit de frontière. Choisies dans les pages d'un catalogue illustré, bâties de blocs de bois préfabriqués, gracieusement peintes de diverses couleurs, elles semblent plutôt posées que fondées sur le sol, comme si elles étaient sorties d'une boîte de jeu de construction.
Nonobstant  la chaleur et l'intimité qu'elles peuvent respirer, semblables à des pavillons de chasse au milieu d'une nature menaçante et brutale, on dirait qu'elles sont faites pour être abandonnées d'un instant à l'autre.


A l'entrée de la Death Valley, dans le tremblement de la canicule, un arbre solitaire. Tout autour, une myriade  d'oiseaux qui voltigent en piaillant. Comme une fête tumultueuse de la vie avant le rien.

L'horreur est, hélas, à la portée de tous. Mais elle revêt ici un caractère spécial: c'est une horreur cinématographique.


La précarité est la vraie muse de l'Amérique.


Mario Andrea Rigoni
Un miroir dans lequel s'attarder
(Notes sur l'Amérique)


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