lundi 21 janvier 2013

La femme vodka


L'anniversaire !
Le roulis des mots inutiles...
Sur la petite chaise, le bras de ce fauteuil vaguement Voltaire
ou sur la bouche du canapé orange, rien...
Ni heureux, ni malheureux,
Je prends subitement conscience que je ne suis pas là.
Comme la dame pipi, le monsieur du vestiaire,
le type arrivé le matin même par l'express de Moscou.
Ils continuent à bavarder dans leur langue de jeunes,
avec leurs mots hybrides, leurs lèvres parfaites, leurs dents blanches.
Déjà heureux de leur vie qui s'annonce,hébétés, sous le charme de leurs projets.
Je fume, dans la brume, hors du monde.
Non, je n'irais pas sur le balcon.
Je suis trop vieux maintenant pour changer quelque chose.
Excitation. Quelqu'un rit, un autre renverse ses haricots sauce tomate sur ses genoux,
et celui-ci, écoutant celle-là, qui prend la pose comme sur la une d'un hebdomadaire télé,
la main sous le menton, les paupières mi-closes.
J'emmène ma brume vers la bibliothèque,
je classe, je trie, je répertorie, je me prépare à un autodafé.
Et puis, la femme surgit dans mon champ d'action,
une petite bouteille verte dans sa main droite, une longue branche de céleri dans l'autre.
Elle grignote, me parle de son mari absent, pour raisons professionnelles, bien entendu.
L'homme fait le commerce de la vodka, est-ce que je veux goûter?
Je vois des flammes dans ses yeux, un petit verre qui apparaît dans sa main.
Je bois.
D'abord, des dégâts superficiels puis, des fleurs, des sentiments.
Le ciel s'allume, je reste immobile, les deux pieds dans les livres.
Je cherche la lune au milieu des étoiles, la Grande Ours, la Croix du Sud !
Je suis uniquement attaché à ce monde par la grâce d'une petite bouteille verte.
Combien de temps me reste-t-il?
Julius Marx




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