C'était l'époque des vestes de tweed avec des pièces aux
manches. Très chic le tweed ! Du moins, on le pensait tous et surtout très intellectuel. Dans
le hall de la cinémathèque de Chaillot il était très important de passer pour
un intellectuel, un vrai penseur du cinéma. Le genre de type qui connait
la totalité des plans d'un film majeur et qui se sent capable d'en
discuter de longues heures avec un autre type très chic vêtu d'une autre veste
de tweed avec des pièces aux manches.
On pouvait croiser également les porteurs de bouquins. Des boutonneux aux cheveux gras, avec sous leurs bras les ouvrages spécialisés racontant la vie et les films de Kurosawa, Welles ou Lang. Le porteur quadrillait le hall en fixant les chics types en veste de tweed, à travers les carreaux de ses épaisses lunettes, avec une expression qui voulait dire : "j'ai abandonné mes lectures juste le temps du film, ensuite, je repars dans ma chambre de bonne."
Les porteurs et les vestes de tweed étaient tous d'accord sur un seul point : rosser immédiatement les raconteurs si on en rencontrait dans la file d'attente.
Le raconteur était celui qui la ramenait toujours en prétendant que la version projetée cet après-midi là était nulle. Bien entendu, lui seul avait eu la chance de visionner la vraie version et il était prêt à vous la raconter sur le champ, ainsi que les relations tendues entre le couple vedette du film et le réa (en ce temps- là, on disait déjà réa, c'était aussi très chic.)
Enfin, il y avait ceux que l'on appelait les clodos (et ça, c'était pas très chic de notre part.) Homme ou femme déjà âgés portant des vêtements élimés et qui n'étaient attirés dans ce lieu ni par le nom du réa ni par celui de sa vedette mais plutôt par le prix modique de l'entrée et le chauffage de la salle.
C'est là, assis dans un fauteuil défoncé entre un clodo qui n'avait pas changé de chaussettes depuis des mois et un porteur qui s'est mis à ronfler dès les premiers plans du film, que j'ai vu pour la première fois Entre le ciel et l’Enfer ou L’Enragé.
On pouvait croiser également les porteurs de bouquins. Des boutonneux aux cheveux gras, avec sous leurs bras les ouvrages spécialisés racontant la vie et les films de Kurosawa, Welles ou Lang. Le porteur quadrillait le hall en fixant les chics types en veste de tweed, à travers les carreaux de ses épaisses lunettes, avec une expression qui voulait dire : "j'ai abandonné mes lectures juste le temps du film, ensuite, je repars dans ma chambre de bonne."
Les porteurs et les vestes de tweed étaient tous d'accord sur un seul point : rosser immédiatement les raconteurs si on en rencontrait dans la file d'attente.
Le raconteur était celui qui la ramenait toujours en prétendant que la version projetée cet après-midi là était nulle. Bien entendu, lui seul avait eu la chance de visionner la vraie version et il était prêt à vous la raconter sur le champ, ainsi que les relations tendues entre le couple vedette du film et le réa (en ce temps- là, on disait déjà réa, c'était aussi très chic.)
Enfin, il y avait ceux que l'on appelait les clodos (et ça, c'était pas très chic de notre part.) Homme ou femme déjà âgés portant des vêtements élimés et qui n'étaient attirés dans ce lieu ni par le nom du réa ni par celui de sa vedette mais plutôt par le prix modique de l'entrée et le chauffage de la salle.
C'est là, assis dans un fauteuil défoncé entre un clodo qui n'avait pas changé de chaussettes depuis des mois et un porteur qui s'est mis à ronfler dès les premiers plans du film, que j'ai vu pour la première fois Entre le ciel et l’Enfer ou L’Enragé.
Aujourd'hui, les vestes de tweed sont cachées au fond
du placard avec des boules de naphtaline dans les poches, les porteurs lisent
sur internet et les clodos ne vont plus au cinéma, les places sont
devenues beaucoup trop chères.
Nostalgique, moi ? Certainement pas.
Nostalgique, moi ? Certainement pas.
Julius Marx
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