Quand la chance(1) nous offre le privilège d'entrouvrir les portes du Paradis Sicilien, on reste un bref instant perplexe. On se demande si dans son futur récit on choisira de favoriser le présent,
ou bien d' accorder une place plus importante au passé.
Et puis, après seulement quelques heures, on se rend vite compte qu'ici, le présent et le passé sont indissociables et qu'il est totalement impossible de tenter de se glisser dans la vie des habitants de l'île sans garder constamment cette information dans un petit coin de son cerveau d'homme du continent.
Alors, par exemple, en dégustant du chocolat dans la ville de Modica, on ne sera pas étonnés d'apprendre que la réputation sucrée de la bourgade est née de la conquête espagnole au XVe siècle.
On ne sera pas surpris non plus en visitant la Médina de Palerme où d'importantes colonies indiennes, indonésiennes, chinoises ou africaines cohabitent dans une cacophonie indescriptible sous le regard des quelques anciens siciliani qui observent calmement le monde bouillonner autour d'eux, assis sur le seuil de leur boutique.Il va de soi qu'ici, l'immigration est inscrite dans l'histoire de chaque famille.
Ce regard en direction de l'étranger, ni insistant, ni bienveillant, mais surtout pas sournois ou méchant, intrigue le visiteur. Dans un premier temps, il déroute celui qui cherche à comprendre, à communiquer. Il doit vite s'habituer à être constamment dans la ligne de mire, comme un drôle de Winston Smith, en short et chemisette.
Et puis, enfin, il y a la parole. Ici, elle demeure rare et précieuse. Elle est souvent énigmatique ou mystérieuse et toujours brève. Les mots sont comptés.On les jurerait aussi précieux que l'eau dans une vallée désertique.
Voilà, je pense que vous êtes maintenant prêts à entrer dans le Paradis.
Ouvrons les portes.
(A suivre)
Julius Marx
(1) Et de généreux donateurs
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