jeudi 28 avril 2011

Et les étoiles ne regardent jamais en bas (20)

Le jour, déjà..
Un ciel porcelaine avec, pourtant, quelques giclures de lune çà et là.
Debout près du lit, Outis fait l'inventaire des dégâts.. Morbide. Du coup, la chambre est devenue beaucoup moins singulière. Il essuie tout ce qu'il peut essuyer avec une serviette prise dans la salle de bains.

Dans le hall
Une petite brune qui joue à la femme fatale a remplacé l'homme de nuit. Elle lit le programme télé de la soirée.
Elle ne lève même pas les yeux lorsque Outis emprunte le grand hall.
Le restaurant est ouvert.. Quelques clients déjà attablés / trois ou quatre serveurs fatigués.
Outis rêve d'un café de la Jamaïque Blue Mountain. Pure fiction. Il sort
Sur le trottoir face à l'entrée de l'hôtel, la Renault 21 est toujours là. Surpris dans un demi-sommeil, le conducteur se redresse vivement en apercevant Outis. Il attrape une carte routière et la déplie sur le volant.
Outis frôle la voiture. Le type tient sa carte à l'envers.
Avalé par deux bourrasques mugissantes, Outis remonte la rue dite tranquille, longe de vilains pavillons de briques rouges alignés comme des cubes.
Hommage au ciel déchaîné, la neige tombe de nouveau ; d'abord fine, légère, puis envahissante.

A l'intérieur de son véhicule de service,
L'auxiliaire principal Mangin tente de se débarrasser de la  fichue buée qui recouvre son pare-brise.
Puis, d'un seul coup, il ne voit plus le suspect..
Il jure, donne un grand coup de poing sur le volant. Contact / le moteur rugit / Mangin crispe les mâchoires.
La Renault 21 dérape / Mangin donne un coup de volant, enfonce rageusement la pédale d'accélérateur.
La voiture attrape une grande congère de neige , patine, mais reste miraculeusement sur la chaussée.
Exit la rue tranquille / où est -il?
Mangin voit surgir devant lui le grand camion des éboueurs, il jure.
La circulation est totalement coupée / Mangin pousse un soupir de dépit. Il saisit son carnet à spirales.

Le quai du métro est inondé
Outis doit marcher lentement pour ne pas glisser. Sur un banc, enveloppé dans un grand carton, un vieux dort.
Ses mains pendant en dehors du carton. Un bonnet lui cache la moitié du visage.
Au-dessus de lui, on vient de coller une affiche : une famille prend son petit-déjeuner en souriant comme des demeurés. La colle dégouline au bas de l'affiche et vient mouiller le paletot du vieux.
Outis est dans le métro. Un grand noir coiffé d' une casquette de cuir, les chaussures maculées de plâtre, récite le Coran . Il remue les lèvres comme s'il broyait des pépins de raisins entre ses dents jaunes, abîmées.
La neige crépite doucement contre les vitres du wagon.
Tout d'un coup, le métro ressort des entrailles de la ville cube entre deux interminables coulées d'immeubles.
Seules quelques fenêtres sont éclairées. C'est l'heure des misérables, des abonnés de l'aube.
Station Hôtel de Ville/ faux marbre pompeux. Sur le quai, des employés aux uniformes fluorescents tentent de réveiller un gamin  en haillon qui ronfle, roulé en boule sur une banquette.




Un des hommes luciole pousse un mugissement
Le gamin lui vomit sur les manches de sa capote. Le bataillon luciole s'agite, vocifère. Le gosse tombe de sa banquette. Il se relève et regarde les bestioles qui l'entoure avec un regard vague.
Au sommet de l'escalier mécanique, une bise glaciale cingle méchamment le visage d'Outis.
Il se retrouve dans une grande avenue rectiligne  qui entaille un quartier de bâtiments cossus. Chaque bâtiment possède, en son rez-de-chaussée , sa boutique de vêtements à la mode, son temple du gadget, sa succursale d'une chaîne de restauration rapide. Les rideaux de fer sont tous  baissés.. L'heure de la consommation n'a pas encore sonnée.
(A suivre)

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