mercredi 4 mai 2011

Peur sur la ville



C'est le grand retour de la peur. Evidemment, comme à son habitude, elle ne revient pas seule. Dans ses bagages, la rumeur s'est cachée comme au bon vieux temps de l'insécurité.
L'insécurité qui justement est le sujet de conversation privilégié par tous. Première information vérifiable, deux prisons ont brûlées dans le Sud du pays et la plupart des détenus se sont fait la belle. Il n'en faut pas plus pour titiller l'imagination. Ces hordes de prisonniers assoiffées de sang vont débarquer dans notre ville, spolier nos biens, s'emparer de nos 4x4 et peut-être même brûler nos super-marchés! Du coup, ceux qui n'ont pas encore remplacé leurs vitrines brisées et qui se sont contentés de monter des murs de briques à la place se frottent les mains.
Autre information, mais celle-la malheureusement invérifiable, c'est l' escalade du nombre de petits délits ; cambriolages, vols de voiture etc. Cette affirmation, relayée par tous, du chauffeur de taxi qui refuse maintenant de travailler la nuit et qui me montre fièrement le gourdin caché sous son siège au chef d'entreprise qui  souhaiterait beaucoup plus de fermeté et pourquoi pas le retour d'un dictateur "soft", est devenue une évidence. Impossible de savoir la vérité ni de connaître les chiffres car, de statistiques ici  il n'y a point et puis, depuis le régime B.A. le peuple se méfie des pourcentages, comment lui donner tort?
Et chacun de  raconter son histoire, le plus souvent celle de voisins ou d'amis proches, innocentes victimes de bandits armés de longs couteaux, s'emparant de l'écran plasma ou du four à micro-ondes.
Ce qui est sûr et que l'observateur avisé peut remarquer très facilement , c'est l'inquiétante "mauvaise humeur" des habitants. Le sourire n'est plus de mise, remplacé par le grognement ou la grimace.
L'Europe, qui connait bien ce genre de situation, est donc habituée à gérer le phénomène. Le remède est aussi simple que le mal : on désigne un bouc-émissaire. L'heureux élu, recroquevillé au fond du bateau qui doit le mener à Lampedusa, ne le sait pas encore. Pour l'instant, il se contente de regarder les étoiles en demandant à son voisin, qui fait le voyage pour la troisième fois, si la terre promise est encore loin.
L'autre lui  répond que non. Pour l'apaiser et pour qu'il lui fiche la paix. Il pense à l'odeur du jasmin, des orangers en fleurs, du tabac aromatisé à la pomme que l'on fume dans les chichas, de l'huile d'olive et à
l' indescriptible couleur du ciel, chez lui, à Djerba.
Julius Marx


 

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