lundi 21 mars 2011

Et les étoiles ne regardent jamais en bas (9)




L'association colombophile du Nord, Boulevard Brandebourg
L'ancienne demeure bourgeoise a perdu de sa superbe depuis longtemps.
Au rez-de-chaussée, on a construit en toute hâte, un grand hall pour recevoir les visiteurs en balayant les cloisons gênantes. Dans les étages, pas de bureaux luxueux, juste des petites pièces sans fenêtre et des vieux meubles croulant sous les dossiers.
Le système de vidéo-surveillance est flambant neuf. Il y a des petites caméras dans chaque pièce , dans chaque recoin.
L'espace réservé au chef est plus grand, plus luxueux. Il y a un bureau, un coin salon avec des fauteuils de cuir, un canapé et un bar.
Le chef s'appelle Paul Lecoeur, mais personne ne l'appelle par son nom.
Tous le monde dit simplement Monsieur.
Monsieur se tient toujours droit, comme si une perche invisible, derrière la nuque l'empêchait de bouger la tête correctement. Il est vêtu d'un costume sombre de bonne coupe.
A l'instant présent, Monsieur pose la clé USB dérobé à Valence, sur le sous-main en cuir de son bureau.
Le blondinet et le malabar encadrent leur chef. Ils fixent tout les deux le rouquin en pariant mentalement sur ses chances de survie.
Monsieur soupire. Il saisit de nouveau la clé, la repose sur le sous-main. Puis, il fixe le rouquin
-Alors, mon petit Félix, tu vas maintenant me dire pourquoi tu as tué cet homme ?
Le rouquin ne répond pas, il baisse la tête, renifle. Monsieur demande encore
-Et cet homme qui l'accompagnait, où est-il maintenant?
Le rouquin se redresse / il veut dire quelque chose / renonce/ secoue la tête
Monsieur hausse le ton
-Vraiment pas? Fais un effort, bon Dieu !
Le rouquin pose ses mains sur son visage / il geint
Le costaud fait un clin d'oeil en direction du blondinet / l'autre pince les lèvres.
Monsieur se lève en soupirant /se dirige vers le bar /se sert une bonne rasade de gin, dans un grand verre. Il parle maintenant sans regarder le rouquin.
-Je t'ai chargé de le suivre, pas de lui faire la peau (glaçons) non?
Le rouquin renifle un oui à peine audible.
-Dans notre organisation, dois-ton, oui ou non, interpréter mes ordres ? (tonic)
Le rouquin renifle un non à peine audible. Monsieur boit . Les glaçons tintent contre la paroi du verre.
Monsieur s'avance, pose sa main sur l'épaule du rouquin / le rouquin sursaute.
Un léger sourire s'installe sur les lèvres du blondinet
-Alors, reprend Monsieur, si je te demande de suivre un homme, et uniquement de le suivre, c'est que j'ai mes raisons.
Le costaud se frotte la joue / un tic nerveux traverse son visage buriné en un éclair.
La main de Monsieur se pose sur la tête du rouquin, exerce une légère pression.
-Je n'ai donc pas envie que l'un des mes hommes s'amuse à jouer les Don Quichotte.
La pression se fait plus forte/ la tête du rouquin s'enfonce entre ses épaules.
-Hiiiii, fait le rouquin
Monsieur ôte sa main. Il grimace. Elle est souillée de brillantine.
Nez de boxeur se précipite / sort un mouchoir de sa poche
Monsieur regarde le rouquin avec une expression de profond dégoût.
Il s'essuie méticuleusement les mains
-Sais-tu qui était Don Quichotte?
Le rouquin fait non de la tête.
Monsieur lève les yeux au ciel.
-Aucune importance... ( il porte son regard sur le blondinet) Dis à Mamadou de l'emmener manger un hamburger.
Le rouquin agrippe les bords de son fauteuil / nez de boxeur fait deux pas dans sa direction / Ses grosses pognes le saisissent comme un paquet de linge sale.
Le rouquin se met à beugler.
Le blondinet frappe le rouquin du tranchant de la main.
Le rouquin s'affaisse / Il pisse sur le parquet
Blondinet détourne la tête.
-Aujourd'hui, les gens n'aiment plus manger, rigole nez de boxeur.
-Oui, c'est triste, approuve blondinet, en desserrant à peine ses lèvres minces.
-Débarrassez-moi de ça ! ordonne Monsieur en portant son verre à ses lèvres.

Autour de la place du monuments aux morts
Les maisons consternées se serrent les unes contre les autres. La neige tourbillonne, le vent gémit. Ils réveillent le fier combattant, là-haut, sur sa stèle.
Emporté dans sa fougue créatrice, le sculpteur patriote a doté le héros d'une grenade en main gauche sans s'apercevoir que son modèle, revanchard, la balance droit sur le commissariat de police.
La façade du commissariat fait des efforts désespérés pour paraître accueillante.
Devant les fenêtres, on a posé de grands bacs à fleurs, planté un drapeau neuf au-dessus de l'entrée et enveloppé le tout d'un long ruban bleu pour lui donner l'aspect d'un paquet cadeau.



L'inspecteur principal Blanquart est mal rasé 
Si son pantalon de toile beige, sa chemise de nylon à rayures jaunes et sa cravate tachée peuvent faire sourire, son anatomie inspire plus la crainte. Ses bras, ses mains, sont énormes, disproportionnés. Planté dans une boule de rides méchantes, son nez violacé peut faire sourire mais, ses yeux noirs transpercent le malheureux visiteur.
Il rote, ramène son menton vers Outis et dit
-Alors?
-Alors rien, répond Outis
Il tente de se redresser / les menottes qui le plaque à la chaise l'en empêchent.
-J'aime pas ça, dit Blanquart... Pas du tout.
A suivre

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