samedi 22 janvier 2011

Et maintenant, passons à quelque chose de tout à fait différent



Huitième jour (après B.A.)
Le  policier nouveau est arrivé !
Oui, les citoyens se sentent à nouveau protégés, nos ronds-points ne sont plus orphelins de ces gardiens de l'ordre. Mais, prudence, pour le moment, les nouveaux fonctionnaires de l'Etat, campent conjointement  avec les militaires et partagent café et cigarettes, appuyés aux sacs de sable habilement empilés.
C'est plus sage. Il  ne serait pas raisonnable d'accélérer ce come-back, sous peine de voir se rouvrir les plaies.
Il paraît que leur tenues aussi sont nouvelles ; un ami m'apprend qu'ils portent maintenant un plastron blanc.
Je lui rétorque que les poulets ont toujours un plastron blanc. Il admet volontiers que j'ai raison.
Nos rapports avec leurs prédécesseurs (les méchants, les vils, les corrompus) ont étés plutôt brefs mais, nous ne les avons pas oubliés.
Dès notre arrivée au village, en signant le contrat de location de notre appartement avec notre propriétaire
 (il faut signaler que la clause numéro 27 qui stipule que je dois gérer mon foyer en bon père de famille respectueux des lois et de la tradition m'a  tout de suite posé un gros problème de conscience : devrai-je donc battre ma femme?).Celui-ci m'a immédiatement informé qu'après les habituelles tracasseries administratives à la mairie, nous étions tenus de nous rendre également au commissariat.
Le poulailler se révéla à la hauteur de mes attentes. Trois pièces avec vue sur cellule, exposées au Nord.
Un mobilier de ces belles années cinquante qui fleurait bon la nostalgie des films " Gabin/Maigret" avec le cliquetis si mélodieux de l'antique machine à écrire. Sur le bureau du commissaire, il ne manquait que l'indispensable cadre avec la photo des enfants et de la femme du maître des lieux. Derrière le chef, on pouvait découvrir le plan du village barbouillé d'un savant quadrillage. A chaque instant, je m'attendais à  entendre le commissaire crier, comme Gabin, son double : "va nous chercher des sandwichs, la nuit risque d'être longue".
Puis, se tournant vers moi, les deux mains solidement posées sur son bureau : "fais-moi confiance mon petit vieux , tu vas parler!".
Par miracle, nous sommes ressortis sains et saufs.


Notre deuxième rendez-vous  avec les forces de l'ordre  se déroula au beau milieu d'un des quartiers réputés "chauds" de la ville voisine. Cette réputation n'était pas usurpée. Au moment d'abandonner notre véhicule, à une centaine de mètres seulement du commissariat, nous nous  demandâmes si nous n'étions pas en train de commettre une de ces grosses bêtises  qui ferait de nous la risée de la communauté pour un bon nombre d'années. La question était simple et nous nous la posâmes aussi simplement : pourquoi risquer de se faire voler sa voiture dans le seul but d'aller porter plainte pour le vol de notre autoradio?
Nous décidâmes de tenter le coup.
L'intérieur du deuxième commissariat était beaucoup moins pittoresque  que le premier. Le mobilier n'était pas plus moderne, loin de là, mais, on nous fit attendre dans une pièce surchargée de dossiers jusqu'au plafond, juste à côté d'un gosse d'une quinzaine d'années menottés à une chaise.
En me remémorant son regard, alors que j'écris aujourd'hui ces lignes, un frisson me parcourt le dos.
Quelle situation ! Nous deux, face à ce gamin, pour un putain d'autoradio!
On ressortit une heure plus tard avec la déclaration de vol en trois exemplaires. Nous venions de prendre une de nos premières leçons. L'adolescent nous avait donné, sans en avoir conscience,  un de ces coups de pieds au cul si bénéfiques pour notre avenir dans le pays.
La troisième confrontation se déroula dans la rue. Un de nos anciens propriétaires s'estimant lésé par un jeune homme se disant agent immobilier, décida d'appeler la police. Un peu plus tard, une voiture banalisée s'arrêta devant la maison. Entre les deux protagonistes, les choses avaient empirées, le verbe était haut, l 'intimidation avait laissé la place à des échanges plus "musclés". Deux molosses en vestes de cuir descendirent de la voiture; deux trentenaires aux crânes rasés, aux mines pas sympathiques du tout.
Après une courte explication du propriétaire et une réponse encore plus courte de l'agent immobilier, les deux flics en civil empoignèrent sans ménagement le jeune  et le balancèrent dans la voiture.
Le propriétaire nous regarda en souriant et ajouta : "Il va passer une mauvaise nuit".
Je me souviens avoir pensé que la mienne ne serait pas meilleure.
Cette police "veste de cuir" sillonnait constamment la ville. Elle était principalement chargée de réprimer le moindre petit incident  et de collecter les infos nécessaires au bon fonctionnement du système B.A.
Il est juste de préciser aussi qu'elle n'aurait jamais pu faire aussi bien son job sans l'aide précieuse des nombreux indicateurs. Nous avions sans cesse l'impression d'être observés, épiés, jugés. Mais, notre position à nous, les étrangers, était tout de même enviable...
Heureusement, aujourd'hui, tout cela, c'est du passé, même si, tout le monde sait ça, une bonne veste en cuir, c'est fait  pour durer...
Julius Marx

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