"J'aime lire allongée sur un canapé, mais ceci n'est pas une profession, hélas." Fran Lebowitz
lundi 17 janvier 2011
Une journée bien faite
Lundi. Quatrième jour (après B.A.)
Nuit calme. Juste quelques tirs épars.
Tout le monde a relativement bien dormi, même si dormir, en ce moment, devient presque une incongruité.
En dessous, ou au-dessus de nos têtes, la radio de notre propriétaire et la télévision de sa fille sont allumées en permanence. Pas de musique, seulement des paroles.Et puis, la fille du propriétaire porte des mules à talons!
J'ai acheté trois dorades, deux mulets (ceux qui portent des petits points jaunes de chaque côté de leur tête) et une tranche d'espadon. Je cuisine l'espadon à la vapeur avec du citron, de l'huile d'olive et de l'origan comme indiqué dans la recette du livre La cuisine de Yasmina. Le bouquin est resté à Jérusalem, dans une de nos malles confisquée par l'armée israélienne. J'aime à penser qu'un soldat sachant lire le français appréciera l'histoire du règne de Roger 1er, en Sicile , placé sous le signe de la plus grande tolérance. Enfin, ça, c'est une autre histoire...
Des nouvelles de notre super-marché. Toujours pas de militaires en vue. Une dizaine d'hommes armés de bâtons montent encore la garde devant la porte. Les bénévoles du quartier semblent prendre leur rôle très au sérieux. L'un d'eux a placé une affiche de B.A. devant la porte du magasin et invite les clients à s'essuyer les pieds dessus avant d'entrer. Une femme ne se fait pas prier. Elle exagère son geste. Tous rigolent de bon coeur avant que le directeur du magasin ne mette fin à la rigolade. Il froisse le papier et le jette dans une poubelle.
Il y a cinq jours, pour ce simple moment de détente, l'addition aurait été très lourde.
Dans les rues adjacentes, des gamins jouent aux "gardiens de la révolution" avec un morceau de tissus blanc enroulé autour du bras et un bâton à la main. Dans quelques heures, les barricades seront reconstituées et la réalité remplacera le jeu.
Je me sens un peu plus en sécurité, l'Ambassade de France nous a envoyé un SMS en nous recommandant de nous adresser, en cas de problème, à l'un de nos 4O chefs d'îlots. Pour l'instant, nous n'avons ni leurs noms, ni leur contact..
18 h. L'heure du couvre-feu a été retardée d'une heure. Nous rentrons en nous demandant encore ce que sera l'avenir. Mais, sous nos contrées, nous savons qu'il ne dépasse jamais la longueur d'une journée bien faite.
Julius Marx
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